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EMERGENCE DES NOTIONS DE GENOCIDE
ET DE CRIME CONTRE L'HUMANITE
A) Des procès pour la mémoire
B) Naissance du droit pénal international
C) D'autres génocides
A) DES PROCES POUR LA MEMOIRE
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1- Nuremberg (novembre 1945-octobre 1946)
Le Premier ministre britannique, Churchill, réclamait le châtiment des
crimes commis. Une autre solution fut retenue: le jugement des principaux
dirigeants du IIIe Reich et d'organisations civiles et militaires
national-socialistes. Les modalités du procès furent fixées au cours de la
conférence de Potsdam, le 8 août 1945.
Les puissances Alliées signeront ensuite les
accords de Londres établissant les statuts d'un tribunal spécial interallié,
composé de quatre juges représentant les quatre grandes nations (un
américain, un britannique, un soviétique et un français). Le choix du lieu
est symbolique : Nuremberg, l'ancienne "ville sainte" du nazisme (qui avait
accueilli notamment des parades nazies et où furent établies les lois antisémites en 1935).
Parade nazie à Nuremberg, 1934
Les plus hauts dignitaires du parti
national-socialiste et les chefs de la Wehrmacht comparaîtront devant lui
pour y répondre de trois principaux chefs d'accusation:
- crimes contre la paix ;
- crimes de guerre : violation des lois et coutumes de guerre, c'est-à-dire
p.ex. assassinat, mauvais traitements de prisonniers de guerre, exécution
d'otages, pillage de biens publics ou privés, destruction sans motif des
villes et village ;
- crime contre l'humanité : tout acte inhumain commis contre les
populations civiles, toute persécution pour motifs politiques, raciaux ou
religieux.
L’ensemble des
magistrats sont issus des quatre puissances victorieuses : Geoffre Lawrence (juge britannique et président); William Birkett (juge britannique suppléant; Francis Biddle (juge américain); John Parker (juge américain suppléant); Henri de Vabre (juge français); Robert Falco (juge français suppléant); Lola Nikitchenko (juge soviétique); Alexander Volchkov (juge soviétique suppléant).
Les juges britanniques et américains Lawrence et Biddle discutent
lors de l'ouverture du procès (20/11/1945)
« En exécution de l'Accord signé le 8 août
1945 par le gouvernement provisoire de la République Française, les
gouvernements des Etats-Unis d'Amérique, du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
de l'Irlande du Nord, et de l'URSS, un tribunal militaire international sera
créé pour juger et punir de façon appropriée et sans délai les grands criminels
de guerre des pays européens de l'Axe. »
Article premier de la Constitution du
Tribunal Militaire International
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Le tribunal de Nuremberg est donc chargé de juger
les chefs nazis et il définit ainsi le crime contre l'humanité : « assassinat,
extermination, réduction en esclavage, déportation et tout autre acte inhumain
commis contre toute population civile, avant ou pendant la guerre, ou bien les
persécutions pour des motifs raciaux ou religieux lorsque ces actes ou
persécutions, qu'ils aient constitué ou non une violation du droit interne du
pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant
dans la compétence du tribunal ». Le tribunal précise qu'il est
compétent pour « juger et punir toutes personnes qui, agissant,
pour le compte des pays européens de l'Axe, auront commis individuellement ou à
titre de membres d'organisations des crimes contre l'humanité ».
Le tribunal de Nuremberg retient par exemple que « les
camps de concentration créés au début de 1933 sous la direction de
l’accusé Göring, prirent de plus en plus d'importance et devinrent comme
un aspect permanent de la politique terroriste des conspirateurs. Les nazis
s'en servirent pour commettre les crimes contre l'Humanité. Parmi les
principaux organismes utilisés pour la perpétration de ces crimes contre l'Humanité, se trouvent les SS et
la Gestapo qui, avec d'autres services ou organismes privilégiés de
l'Etat et du parti, étaient habilités à opérer, sans aucun contrôle
légal. »
Les criminels de guerre nazis au banc des accusés
Premier rang, de gauche à droite : Hermann Göring ,
Rudolf Hess , Joachim von Ribbentrop , Wilhelm Keitel , Ernst Kaltenbrunner
, Alfred Rosenberg , Hans Frank , Wilhelm Frick , Julius Streicher , Walther
Funk , Hjalmar Schacht.
Deuxième rang, de gauche à droite : Karl Dönitz , Erich Raeder , Baldur von
Schirach , Fritz Sauckel , Alfred Jodl , Franz von Papen , Arthur
Seyss-Inquart , Albert Speer , Konstantin van Neurath , Hans Fritzsche
Durant la tenue du procès, les juges internationaux
de Nuremberg eurent à se prononcer sur le cas de 24 accusés dont un seul fut
acquitté, l’économiste Schacht. Les jugements rendus à Nuremberg ont une
importance considérable pour la mémoire collective. En effet, la condamnation
de responsables nazis pour crime de guerre, crime contre
l’humanité et génocide rend incontestable les horreurs commises
durant la deuxième guerre mondiale par les nazis, donc le génocide.
LES 24 ACCUSES
DU TRIBUNAL DE NUREMBERG (1945-1946)
ACCUSES
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POSTE
DANS
LE
III° REICH
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VERDICT
DU TRIBUNAL
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Karl Döritz
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Commandant en chef de la marine allemande
|
10 ans de prison
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Hans Frank
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Gouverneur général de la Pologne
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Condamné à mort
|
Wilhelm Frick
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Ancien ministre de l'Intérieur
|
Condamné à mort
|
Hans Fritzsche
|
Directeur du service de la radio au ministère de
la propagande
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Acquitté
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Walter Funk
|
Président de la Reichsbank jusqu'en 1939
|
Prison à vie
|
Hermann Göring
|
Ancien Maréchal du Reich
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Condamné à la peine de mort, s'empoisonne avant
l'exécution
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Rudolf Hess
|
Adjoint d'Hitler jusqu'en 1941
|
Prison à vie
|
Alfred Jodl
|
Chef d'Etat Major des opérations de guerre du
Commandement suprême des forces armées (OKW)
|
Condamné à mort
|
Ernst Kaltenbrunner
|
Chef de la police de sécurité
|
Condamné à mort
|
Wilhelm keitel
|
Maréchal et chef de l'OKW
|
Condamné à mort
|
Constantin von Neurath
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Ministre des affaires étrangères (1932-1938)
|
15 ans de prison
|
Franz von Paper
|
Vice-chancelier puis ambassadeur du Reich
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Acquitté par Nuremberg puis 8 ans de prison par le
tribunal allemand
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Erich Raeder
|
Commandant en chef de la marine (1928-1943)
|
Prison à vie
|
Joachim von Ribbertrog
|
Ministre des affaires étrangères
|
Condamné à mort
|
Alfred Roserberg
|
Ministre des Territoires occupés de l'Est
|
Condamné à mort
|
Fritz Sarkel
|
Commissaire de la main d'oeuvre
|
Condamné à mort
|
Hjalman Schacht
|
Ministre de l'économie (1934-1937)
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Acquitté puis brièvement emprisonné par
l'Allemagne
|
Baldur von Schirach
|
Chef de la jeunesse hitlérienne et garleiter (chef
de district) à Vienne
|
20 ans de prison
|
Arthur Seyss-Inquart
|
Chancelier de l'Autriche puis commissaire du Reich
dans les Pays-Bas occupés
|
Condamné à mort
|
Albert Speer
|
Ministre de l'armement et de la production de
guerre
|
20 ans de prison à Spardau
|
Julius Streicher
|
Responsable du journal antisémite « Der
Stürmer »
|
Condamné à mort
|
Martin Bormann
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Conseiller d'Hitler
à partir de 1943
|
Mort en mai 1945 à Berlin
ou en fuite
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Robert Ley
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Ancier dirigeant du Deutsche Arbeitfront (DAF,
front Allemand du travail)
|
Se suicide dès le 25 octobre
dans sa cellule
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Les limites du procès
Le procès, pour lequel il fallut, au préalable, définir une loi écrite
internationale, érigeait en quelque sorte les vainqueurs en juges des
vaincus : il parut donc partial aux Allemands, d'autant plus qu'il
n'inscrivait pas dans sa compétence les exactions causées par des chefs
alliés.
Pour exemple, le procès a occulté l'exécution par les Soviétiques de 4 500
officiers polonais découverts dans le charnier de Katyn, tout comme les
bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki par l'aviation américaine. Par
ailleurs, de nombreux responsables nazis en fuite ont échappé à son verdict
et certains d'entre eux ont même été utilisés et protégés par les Alliés
eux-mêmes, à l'époque de la guerre froide.
A l'inverse, le procès pouvait passer pour être celui de la nation allemande
dans son ensemble. Or il existait des familles allemandes anti-hitlériennes et parmi les
alliés, on comptait aussi des collaborateurs au régime hitlérien. Du moins les accusés purent-ils librement choisir leurs avocats et présenter
le système de défense qui leur paraissait le plus efficace.
Mais le grand succès du procès de Nuremberg a sans doute été, au-delà de la
condamnation et du châtiment des coupables, de démonter le mécanisme de
destruction mis en place par les nazis (le processus de dénazification en
Allemagne devait suivre), et de faire reconnaître juridiquement les crimes
de guerre et les crimes contre l'humanité tout en définissant le crime de
génocide.
2- Le procès Eichmann (1961)
Adolf Eichmann est né
en 1906 à Salingen en Rhénanie. Entré dans les S.S. Autrichiens en 1932,
Eichmann fut recruté par la police secrète nazie (SD) en 1934. Lors de
l'annexion de l'Autriche par les
Allemands en 1938, l'Anschluss, il fut chargé d'organiser à
Vienne et à Prague la déportation des Juifs d'Autriche et de Tchécoslovaquie.
En 1940, il fut chargé par Heydrich de mettre en oeuvre « la
solution finale », c'est à dire l'extermination de tous les juifs
d'Europe. Eichmann fut arrêté par les Alliés mais parvint à s'échapper
et à se réfugier en Argentine où il fut découvert en 1960 par des agents des
services secrets israéliens qui l'enlevèrent et qui l'emmenèrent en Israël. Il
fut jugé à Jérusalem et condamné à mort pour crime contre l'humanité. Il
fut exécuté par pendaison le 31 mai 1962.
Discours à la Knesset
du premier ministre Israélien David Ben Gourion le 23 mai 1960
« Il
y a peu de temps, un des principaux criminel de guerre nazi, Adolf
Eichmann, qui fut responsable avec ses dirigeant nazis de ce qu'ils
appelaient le « solution finale » de la question juive, c'est à dire
l'extermination de 6 millions de Juifs en Europe, à été découvert par les
services secrets israéliens. Adolf Eichmann est d'ores et déjà en Israël, en
état d'arrestation et sera jugé prochainement. Conformément aux dispositions de
la loi sur le châtiment des nazis et de leurs collaborateurs ».
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Eichmann lors de son procès à Jérusalem
3- La France face à son passé douloureux : K. Barbie, P. Touvier, R. Bousquet et M. Papon
Les procès de Klaus Barbie, Paul Touvier, Maurice Papon et
René Bousquet ont mis en lumière la collaboration de certains Français durant la
seconde guerre mondiale. En effet des fonctionnaires de Vichy ou des miliciens
ont favorisé le génocide, participant au crime contre l’humanité.
Ces procès tenus durant les années 1980 et 1990 confirmèrent que la France ne
fut pas uniquement résistante comme l’avait déclaré le Général de Gaulle
au lendemain de la seconde guerre mondiale. En effet certains Français avaient
choisi d’être aux côtés des nazis.
Klaus Barbie (1913-1991), membre des jeunesses nazies en
1931, ancien officier S.S. et ancien chef de la Gestapo de Lyon, il
participe à la mort de Jean Moulin, responsable du C.N.R.(Conseil National de
la Résistance) et fondateur des F.F.I. (Forces Françaises de l’Intérieur). Il
est également l’organisateur de la déportation des enfants d’Izieu. Il fut
inculpé en 1983, jugé à Lyon et condamné à la réclusion criminelle à perpétuité
le 4 juillet 1987.
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René Bousquet (1909-1991), secrétaire général à la police, inculpé en mars 1991, il fut assassiné
le 6 juin 1993 par un déséquilibré avant l’ouverture de son procès. Sous le
régime de Vichy, René Bousquet participa activement au rapprochement entre la
police française et les occupants nazis, appliquant avec zèle les
directives allemandes et allant même au delà de ces dernières, notamment lors
des rafles de Juifs français comme celle du Vel’d’Hiv. D’ailleurs Himmler
déclara : « Bousquet est un collaborateur précieux dans le cadre de la collaboration
policière ». René Bousquet incarne donc la
France « collaborationniste ».
Paul Touvier (1915-1996), ancien milicien, condamné deux fois à mort par contumace en septembre
1946 et mars 1947, il avait été gracié par le Président de la République
Georges Pompidou. Des plaintes furent déposées en 1987. Paul Touvier fut arrêté le
24 mai 1989 et inculpé. Il fut condamné en 1994 à la réclusion criminelle à
perpétuité pour l'exécution d'otages Juifs à Rilleux-la-Pape durant la deuxième
guerre mondiale.
Maurice Papon (1910-…), fonctionnaire à la préfecture de
Bordeaux, zélé, il a joué un rôle dans la déportation des Juifs de Bordeaux. Il
fallut seize années de procédure pour que Maurice Papon, inculpé en 1983, puis
après annulation de la procédure, à nouveau en 1988 et en 1992, comparût devant
la justice le 8 octobre 1997. Maurice Papon fut condamné à 10 ans de réclusion
criminelle et à la privation des droits civiques pour complicité de crimes
contre l'humanité, sans toutefois retenir celle d'assassinat.
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B) NAISSANCE DU DROIT PENAL INTERNATIONAL : NUREMBERG, T.P.I., C.P.I.
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1- Nuremberg, à l'origine des notions de génocide et de crime contre l'humanité
Le terme de
génocide est apparu pour la première fois dans un document officiel
en octobre 1945 dans l'acte
d'accusation du Tribunal militaire international de Nuremberg. Il a été créé en
1944 par le juriste américain d'origine polonaise, Raphaël Lemkin, pour tenter
de définir les crimes perpétrés par les nazis à l'encontre des peuples
Juif et Tsigane durant la seconde guerre mondiale. Il témoigne d'une double
volonté de la part de la communauté internationale :
-celle de punir un crime jusque-là inconnu dans le vocabulaire
juridique pénal.
-celle de qualifier la destruction systématique des peuples Juif et
Tsigane par l'Etat hitlérien.
La notion de génocide fut ensuite l'objet de précisions lors de la
convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9
décembre 1948, entrée en vigueur le 12 janvier 1951.
Ainsi, ce sont avant tout des individus qui sont le
plus souvent les victimes directes de telles exactions. En cela le génocide peut ressembler
au crime contre l'humanité. Mais la spécificité du génocide
réside dans le fait que l'auteur d'un crime de génocide vise la
destruction du groupe auquel appartient la victime. Au delà de l'individu,
c'est donc toute la communauté dont il est issu qui est visée. Par
l'élimination d'un de ses membres, le criminel entend contribuer à faire
disparaître l'ensemble du groupe, « national, ethnique, racial ou
religieux ».
Les historiens
évoquent des génocides pour lesquels le débat est toujours en
cours :
- le massacre
de dix millions de Chinois par les Mongols au X° siècle, qui représente la plus
grande extermination d'êtres humains de toute l'Histoire ;
- la
déportation des Acadiens par les Anglais dirigée par le Général Monkton en 1755
afin de les déposséder de leurs terres;
- la Tasmanie qui a été qualifiée de génocide le plus parfait de
l'histoire ;
- l'extermination des Beotuks à Terre-Neuve par les Anglais
- l’extermination
des peuples Indiens par les Américains. Par exemple, J.Amherst, gouverneur
militaire, a fait distribuer aux Indiens Delaware en 1763 des couvertures infectées .
- les premiers
camps de concentration ont été expérimentés au cours de la guerre des Boers
en Afrique du Sud. Des centaines d'Afrikaanders, des noirs alliés à ces
derniers, femmes et enfants y décédaient rapidement.
En revanche,
certains génocides du XXème siècle sont reconnus sur le plan
international :
- le génocide des
Arméniens commis par les Turcs (1915).
- le génocide juif et tzigane commis par les nazis durant
la deuxième guerre mondiale.
- le génocide cambodgien commis par les Khmers rouges entre 1975
et 1979.
- le génocide Tutsi au Rwanda commis par les Hutus (1994).
- le génocide Bosniaque en ex-Yougoslavie commis par les Serbes
(1995).
Bien
évidemment, il apparaît impossible d’établir des comparaisons entre les
différents génocides, néanmoins celui perpétré par les nazis se
singularise par ses caractères “industriel” et “burocratique”, lui faisant
atteindre un certain paroxisme! Sa mise en place a pour origine un homme, Adolf
Hitler, qui dés 1923 dans "Mein Kampf" expose ses thèses
antisémites : « les Juifs deviennent les ferments de
décompositions des peuples et des races et, au sens le plus large, ils
désagrègent la civilisation humaine ». Ainsi selon lui, « l'Histoire
établit avec une effroyable évidence que, lorsque l'Aryen
a mélangé son sang avec celui de peuples inférieurs, le résultat de ce mélange
a été la ruine du peuple civilisateur ».
L'antisémitisme du régime
nazi se traduit en 1935 par la mise en place des lois de Nuremberg, dont la conséquence est l’exclusion des Juifs de
la société allemande, poussant un grand nombre de ces derniers à quitter le
pays. En 1938, la violence monta d'un cran lors de la « Nuit de
cristal » du 9 novembre dont le but était d’exclure totalement les Juifs
de la société en impliquant un maximum d’Allemands dans les violences à
l’encontre des Juifs. La guerre éclata et suite à l’invasion de la Pologne par
l’Allemagne en septembre 1939, les Juifs de ce pays furent rassemblés et
enfermés dans des ghettos situés à proximité des nœuds ferroviaires où ils
furent astreints au travail forcé. En 1940, suite à la défaite française, les nazis
envisagèrent de transférer tous les Juifs d'Europe à Madagascar, colonie
française. Cette possibilité fut bien vite oubliée et la déportation des Juifs
continua.
En 1941, les chefs nazis prirent la grande décision : mettre
en oeuvre la politique d'extermination systématique des Juifs. Ils la dissimulèrent
sous le nom de « solution finale à la question juive » ou plus
généralement par « solution finale ». Ainsi des forces mobiles se
greffèrent aux groupes d'interventions « einsatzgruppen ».
Elles étaient chargées de fusiller sur place toutes les personnes ne méritant
pas la vie (adhérents au parti communiste ainsi que tous les Juifs), ceci au
fur et à mesure de l'avancée allemande sur le territoire soviétique.
Cette
méthode fut mise de côté, jugée ''trop traumatisante'' pour les troupes
allemandes. En revanche, l'extension du génocide sur l'ensemble du
continent européen s’accrut par la construction des camps de concentration
et ceux d’extermination. Ces derniers étaient équipés de camions et de
chambres à gaz utilisant du monoxyde de carbone ou du zyklon B, sans oublier
l'utilisation des fours crématoires. Certains camps présentaient la
particularité de combiner concentration et extermination. En 1942, le processus
d'extermination s'intensifia. De toute l'Europe occupée partaient des convois à
destination des camps d’extermination basés en Pologne comme celui
d’Auschwitz. Le roman de Robert Merle, "La mort est mon métier", ou le
film de Constantin Costa-Gavras, "Amen", montrent bien la mise en place de
cette « industrie de la mort » par les nazis. A partir de
1944, les nazis constatant l’avancée des troupes Alliées, commencèrent
l’évacuation des camps et tentèrent d’en effacer les traces afin que leurs
atrocités ne soient jamais révélées au monde.
A la notion de
génocide, le tribunal de Nuremberg (1945-1946) ajouta celle de crime
contre l’humanité. Les juristes en donnèrent la définition
suivante : « assassinat, extermination, réduction en esclavage,
déportation et tout autre acte inhumain commis contre toute population civile,
avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs raciaux ou
religieux lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient constitué ou non une
violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés » (article 6c
du statut du tribunal de Nuremberg).
L'évolution de
la notion de crime contre l'humanité réside en son inscription dans le
droit international et dans le droit de nombreux Etats comme celui de la
France. Le crime contre l'humanité, malgré ses débuts modestes puisque
il prévoyait explicitement de ne s'appliquer qu'aux actes commis par les
puissances de l'Axe, a peu à peu été inscrit dans la législation internationale
et vu au passage sa définition précisée. Une résolution des Nations Unies est
ainsi votée en 1948 « confirmant les principes du droit international
reconnus par le statut de la cour de Nuremberg et par l'arrêt de cette
cour ».
La définition est élargie en 1973 lors de la Convention
internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid.
Elle qualifie l'apartheid de crime contre l'humanité. En 1992 une
résolution ajoute que les enlèvements de personnes relèvent également des crimes
contre l'humanité. En plus de la définition, c'est le statut juridique du
crime contre l'humanité qui se précise également. En 1968, il est décidé que
désormais les crimes contre l’humanité sont « imprescriptibles ».
La définition
de crime contre l'humanité s’inscrit en 1998 dans l'article 7 du statut
de Rome de la Cour Pénale Internationale. Cet article définit de façon complète
le crime contre l'humanité. Ainsi, on parle de crimes contre
l'humanité lorsqu'ils sont commis « ...dans le cadre d'une attaque
généralisée ou systématique dirigée contre toute population civile et en
connaissance de l'attaque [...] Meurtre, extermination, réduction en esclavage,
déportation ou transfert forcé de population, emprisonnement [...], torture,
viol, esclavage sexuel [...], persécution de tout groupe ou de toute
collectivité identifiable pour des motifs d'ordre racial, religieux [...],
disparitions forcées de personnes, crime d'apartheid, autres actes
inhumains [...]. Chaque terme est ensuite redéfinit plus en détail, comme les
termes extermination, déportation [...] La notion de crime contre l'humanité
est définitivement extraite de son contexte initial et définie
rigoureusement ».
En France, à
la fin de la guerre, la qualification de crime contre l'humanité ne fut
pas utilisée pour la répression des crimes commis tant par les Allemands que
par les Français. La répression fut effectuée par des juridictions d'exception
mais pour des crimes de droit commun.
Le temps passant et la volonté que
les criminels ne puissent bénéficier de la prescription, la loi du 26 décembre
1964 inscrit le crime contre l'humanité dans l'ordre juridique français.
C'est alors un unique article du Code pénal qui renvoie à la charte du Tribunal
international de 1945 et à la résolution des Nations Unies du 13 février 1946.
Il déclare ces crimes « imprescriptibles par leur nature »,
c'est à dire qu'ils peuvent être jugés sans aucun délai de temps. Il s'agit du
seul crime imprescriptible du droit français.
Les procédures ouvertes donnent
lieu à une jurisprudence déterminante dans la définition du crime contre
l'humanité. Par exemple, le 20 décembre 1985, un arrêt de la Cour de
cassation élargit la notion de crime
contre l’humanité « aux victimes de discriminations politiques, en
plus des victimes de discriminations raciales ou religieuses », afin
que soient jugés ceux qui ont persécuté les Juifs aussi bien que les résistants.
Cette décision vise des personnes tels que Klaus Barbie, Paul Touvier ou encore
René Bousquet. La même année, la Cour de cassation affine de nouveau la
définition en affirmant que ces crimes contre l’humanité sont reconnus
dés qu’« un Etat pratique une politique d'hégémonie idéologique ».
Finalement, les Parlementaires français votent en 1994 une loi définissant
précisément le crime contre l'humanité afin de clarifier cette notion
juridique dans le droit français.
Le tribunal de
Nuremberg constitua une avancée pour le droit pénal international. Les notions
de génocide et de crime contre l’humanité y furent fondées.
2- Le T. P. I. (Tribunal Pénal International) et la C. P. I. (Cour Pénale Internationale)
Comme une
suite à Nuremberg, un Tribunal Pénal International est mis en place afin
de juger les plus graves crimes comme les crimes contre l'humanité et
les génocides . Il a été mis en place par le Conseil de sécurité de
l'ONU (Organisation des Nations Unies) suite aux résolutions du 8 novembre
1994, du 27 février 1995 et du 30 avril 1998.
Ainsi deux
T.P.I. ont vu le jour :
- le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie (T.P.I.Y.) a été
instauré le 25 mai 1993 par la résolution 827 du Conseil de sécurité des
Nations-Unies, afin de poursuivre les personnes responsables de violations
graves du droit international humanitaire sur le territoire de l'ex-Yougoslavie
depuis le 1er janvier 1991. On dénombre ainsi 48 accusés dont 31 font l'objet
d'un mandat d'arrêt international. Certain accusés sont actuellement jugés par
le T.P.I.Y. comme l’ex-Président Serbe, Slobodan Milosevic pour sa
participation au génocide bosniaque.
Slobodan Milosevic (1941-...) lors de son jugement par le T.P.I.
- le Tribunal
Pénal International pour le Rwanda (T.P.I.R.) a été installé le 8 novembre 1994
par le Conseil de sécurité des Nations-Unies afin de juger les personnes
responsables d'actes de génocide et d'autres violations graves du droit
international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda, ou par des
citoyens Rwandais sur le territoire d'Etats voisins, entre le 1er janvier et le
31 décembre 1994. On recense 50 accusés dans ce procès, 9 ont déjà été
condamnés pour crime contre l’humanité.
La création des deux T.P.I. a remis à l'ordre du jour le projet de
création d'une juridiction pénale universelle. Cette volonté aboutit avec la
création de la Cour Pénale
Internationale (C.P.I.) le 1er juillet 2002 qui est permanente, à la
différence des T.P.I., et qui a un champ d'action qui s'étend sur tous les
Etats ayant ratifié le statut de Rome. La C.P.I. se réserve le droit
d’intervenir même sur des criminels dont le pays ne l’a pas reconnue. Elle est actuellement basée à La Haye aux Pays-Bas.
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C) D'AUTRES GENOCIDES
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1- Le génocide arménien
Le samedi 24 avril 1915, à Istanbul, capitale de l'Empire Ottoman, 600 notables
Arméniens sont assassinés sur ordre du gouvernement. C'est le début d'un génocide,
le premier du XXème siècle.
Il fait environ 1,2 million de victimes dans
la population arménienne de l'Empire turc. Voici le texte d'un télégramme
transmis par le Ministre aux cellules de Jeunes-Turcs : « Le gouvernement a
décidé de détruire tous les Arméniens résidant en Turquie. Il faut mettre fin à
leur existence, aussi criminelles que soient les mesures à prendre. Il ne faut
tenir compte ni de l'âge, ni du sexe. Les scrupules de conscience n'ont pas
leur place ici. »
Dans les sept provinces orientales, les Arméniens
sont tués sur place par l'armée ou réunis en longs convois et déportés .Ces
longues marches se déroulent sous le soleil de l'été, dans des conditions
épouvantables, sans vivre et sans eau, sous la menace constante des montagnards
Kurdes, trop heureux de pouvoir librement exterminer leurs voisins et rivaux.
Elles débouchent en général sur une mort rapide. Après les habitants de l'est,
vient le tour des autres Arméniens de l'Empire. Au total périssent les deux
tiers de la population arménienne sous souveraineté Ottomane.
Commémoration du génocide arménien à Montréal (Canada)
2- Le génocide cambodgien
Quand les Khmers rouges
arrivent au pouvoir au Cambodge en 1975, ils sont déterminés
à créer une nouvelle société en commençant par détruire tous les aspects de
l'ancienne. Ils mettent à exécution un programme qui consiste à fermer les
écoles, les hôpitaux ..., à supprimer la propriété privée, à faire déplacer les
gens des zones urbaines aux camps de travaux collectifs.
Le régime des Khmers
rouges commence aussi à exécuter systématiquement toute personne ayant eu des
relations avec l'ancien gouvernement, les intellectuels et les ethnies
vietnamiennes. Le nombre exact de victimes du régime Khmer rouge est encore
débattu. Le gouvernement qui succède aux Khmers rouges en 1979
avance le nombre de 3,3 millions de morts.
Ossuaire du génocide cambodgien
3- Le génocide rwandais
La population du Rwanda et du Burundi, dans la
région des Grands Lacs de l'est africain, est formée de deux ethnies: les Hutu
et les Tutsi. Accentué durant la colonisation, le clivage ethnique se traduit
après l'indépendance par des meurtres collectifs entre les deux ethnies dès
1959, puis en 1963 et en 1972.
Dès 1962, l'Etat rwandais assure son pouvoir en
renforçant ce clivage ethnique sur fond de crise sociale et économique. En
1994, une faction extrémiste du gouvernement et de l'administration de l'Etat
rwandais, dirigé par des Hutu, fait massacrer des opposants politiques Hutu et
des intellectuels Tutsi. Puis commence la mise à mort systématique des Tutsi
qui forment environ 10% de la population du Rwanda. La tuerie est orchestré par
les milices de la garde présidentielle mais la population civile Hutu y
collabore. Un carnage anarchique qui fait entre 200 000 et 800 000 morts
et un million de réfugiés. Les tueurs se cachent souvent parmi les réfugiés
entassés dans des camps au Zaïre et en Tanzanie.
4- Le génocide en ex-Yougoslavie
La Chambre d'appel du Tribunal Pénal International
pour l'ex-Yougoslavie (T.P.I.Y.) a définitivement confirmé, le 19 avril 2004,
que le massacre de plus de 7000 Musulmans de Bosnie de Srebrenica (Bosnie
orientale), en 1995, constituait un génocide. Ce tribunal a par exemple
infligé une peine de 36 ans de prison au
Général Serbe de Bosnie Radislav Krstic, accusé de « complicité
de génocide, de crime contre l'humanité et de crime de
guerre. »
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